Jessica Christ, comportementaliste canin et félin, nous livre ses réflexions sur le comportement félin
dans le journal Les Dernières Nouvelles d’Alsace.
Voici l’article paru dans l’édition du 16 octobre 2022.
Panda est un chat européen mâle de 2 ans. Il vit dans un appartement au centre-ville de Mulhouse avec Mathieu et Benjamin, aux petits soins pour répondre à tous ses besoins. Malheureusement, en pleine nuit, Panda est entré dans la chambre et a violemment mordu Benjamin au visage.
Un réveil choquant, une tempe tuméfiée, des antibiotiques après une visite aux urgences… Benjamin me raconte déconfit le choc et sa perte de confiance en son animal tandis qu’il effleure du bout des doigts son visage gonflé et teinté de pourpre et de bétadine. Que s’est-il passé ? Pour quelle raison Panda a-t-il agi de cette manière ?
Le couple a bien pensé à se séparer directement du matou mais l’un comme l’autre n’ont pas pu s’y résoudre et m’ont contactée pour comprendre l’origine de cette attaque. Ce qui est une bonne chose car très vite, je comprends que les coups de pattes, les sauts sur les humains étaient déjà quotidiens. Mathieu m’explique que Panda est très énergique et a souvent tendance à « chopper » les jambes, caché dans le couloir ou derrière une porte. Qu’il a aussi l’habitude de venir guilleret sur le canapé et de mordre ou de pédaler au bout de quelques secondes de câlins.
Plus les explications sur leur quotidien se précisent en détail, plus je comprends que Panda (qui manque aussi d’une bonne gestion émotionnelle) n’est pas dans la même conversation que les humains. Ce qui est traduit du côté de Ben et Mat comme un comportement de jeu et de demande de caresses est en réalité un comportement d’appropriation de l’environnement (normale chez le chat) qui tourne au vinaigre.
Panda se fait régulièrement gronder et est repoussé par les humains après une griffure. Cette réponse semble bien logique mais elle ne règle pas le problème grandissant.
En effet, tout du long, Panda renforce une association négative avec ses humains. A chaque fois qu’il vient marquer son environnement sans attendre de caresses, il en reçoit et se défend de façon de plus en plus véhémente car il n’est pas compris dans ses premiers signaux d’apaisement qui se compareraient à notre « politesse » humaine pour dire « non merci, peux-tu arrêter ? ».
Cette association négative se construit autour de petites incompréhensions et grandit, se renforce. Au bout d’un certain temps, Panda ne se sent plus à l’aise dès que les humains sont présents et la frustration ingérable engendre des attaques qui semblent comme sorties de nulle part. Elles sont déclenchées par une odeur, la vue d’un des humains ou un son, une intonation de voix. Elles découlent de l’apprentissage négatif qui a été renforcé.
Dans le cas de Mathieu et Benjamin, la confiance va revenir avec le temps comme pour Panda. Nous avons mis en place tout un processus d’apaisement suivi d’un réapprentissage, d’une désensibilisation pour Ben mais aussi pour Panda.
L’incompréhension fait partie des plus grandes causes d’abandon. Il est parfois difficile de trouver le courage et la motivation de chercher des solutions lorsque la situation est arrivée à un stade effrayant. Aujourd’hui, Ben, Mat et Panda vivent en harmonie.
Jessica CHRIST
