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Les relations entre humains et animaux dans le champ du droit, par Isabelle Doussan

Par Nicolas

Chronique sur le livre « droit et animal, pour un droit des relations avec les humains », de Isabelle Doussan

 

La protection des animaux s’acquiert par la prise de conscience de leur identité, et par la possibilité de leur rendre justice en condamnant les mauvais traitements et les malveillances volontaires comme involontaires.

 

Le reconnaissance de la sensibilité animale est un droit acquis

 

Ce précepte est soutenu par l’article 515-14 du code civil du 16 février 2015, affirmant que « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité », en renfort de la loi du 10 juillet 1976 qui évoquait déjà l’animal comme un « être sensible ».

Pour nous qui intégrons désormais nos animaux de compagnie au rang de membres à part entière de nos cellules familiales, c’est l’évidence : les animaux sont « sentients », ils ont la capacité de ressentir des émotions, comme la joie, le plaisir, la douleur ou la peur. La prise en compte de l’éthique animale s’amplifie, toute violence à leur égard doit être condamnée.

Cependant, si nous nous engageons à choyer nos chiens, chats, lapins, furets et autres hamsters lorsqu’ils nous tiennent compagnie, nous oublions parfois que leurs cousins et cousines ont une tout autre destination, celle d’être exploités pour l’élevage, la chasse et la recherche. La notion de protection animale au travers de notre relation à eux prend un autre sens.

 

Le droit doit s’adapter à des situations relationnelles Humain-Animal variées

 

Membre de la famille, marchandise à but économique et/ou de loisir, voire nuisible (ou ESOD, « espèces susceptibles d’occasionner des dégâts »), l’animal n’a pas de statut bien défini dans notre système juridique actuel, qui peine à trouver, sur le critère de sa sensibilité, une voie satisfaisant les heureux propriétaires tout autant que les professionnels des filières de santé, d’élevage, de transport, d’abattage. Pour Isabelle Doussan, directrice de recherche à l’INRAE de l’université Côte d’Azur, autrice de « Droit et animal, pour un droit des relations avec les humains », le droit français a atteint une limite.

L’ambivalence tient entre autres de ce même article 515-14 du code civil, qui se conclut ainsi : « sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens. » La diversité des situations relationnelles avec les animaux, depuis la « présomption d’attachement » jusqu’à la pire cruauté humaine, ne trouve pas toujours des réponses appropriées en cas de litige, malgré leur reconnaissance d’ « êtres sensibles ». Humain ou non-humain, objet ou sujet, le droit français nous impose de choisir.

Dans son livre, Isabelle Doussan rappelle que les modalités relationnelles telles que la collaboration ou l’attachement sont peu représentées dans le droit français, davantage basé sur le pouvoir qu’exerce l’humain sur l’animal. Si la sensibilité animale peut constituer une sécurité minimale à nos excès, elle est diversement comprise selon la raison d’être de l’animal.

 

Faire évoluer le droit pour mieux respecter la sensibilité des animaux

 

Alors comment faire évoluer le droit ?
L’auteure évoque l’opportunité d’offrir une personnalité juridique à l’animal, et son expertise apporte des réflexions bien plus nuancées que ce que l’on pouvait attendre ! Si l’animal devenait un « sujet de droit », devrait-il obtenir les mêmes privilèges que les humains, comme le droit à la vie ? Faudrait-il inventer un droit intermédiaire spécifique ? Devrait-on mettre en place des critères de sélection ?

Structurellement, notre droit est fondé sur cette séparation binaire entre objet exploité et sujet qui s’autodétermine. Isabelle Doussan encourage un nouveau paradigme, qui considérerait que l’on peut être titulaire de droits sans être sujet de droit, avec pour fondation le « principe de vulnérabilité », déterminant le caractère nécessaire ou non de la souffrance. En reprenant le concept des « meilleures techniques disponibles » (MTD) au profit de nos relations aux animaux, qu’ils soient de compagnie, de rente, sauvages ou utilisés pour la recherche, elle soutient que la sensibilité animale serait mieux évaluée et protégée.

Voilà un point de vue, étayé de façon claire et concise avec de nombreux cas récents de jurisprudence, qui permet d’entrevoir une adaptation du droit plus respectueuse de la sensibilité de tous les animaux. Ce livre est une très bonne porte d’entrée pour comprendre le fonctionnement de notre système juridique et ses implications sur les animaux, et pour appréhender les évolutions en cours.

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