Contamination émotionnelle
Marguerite se demande si son chien d’habitude de composition très joyeuse peut ressentir sa tristesse après les événements de la semaine passée (les attentats).
Comme beaucoup d’entre nous, Marguerite est en état de sidération depuis plusieurs jours, et à la faveur d’une observation en promenade elle s’est rendue compte que son Gribouille n’était pas non plus au meilleur de sa forme. Peut-être a-t-elle projeté son propre chagrin sur son meilleur ami, imaginé qu’il la comprenait, cru qu’il savait ce qui était en train de se produire.
Contamination émotionnelle
Nous l’avons souvent écrit dans ces pages, il est avéré depuis des années que nos amis les animaux vivent des émotions, les mêmes que les nôtres. Ils ressentent la tristesse, la joie, la peur, la colère, la surprise et le dégoût et captent finement nos ressentis. Si Marguerite s’est sentie malheureuse, en état d’incapacité de vivre sa vie quotidienne comme elle le fait depuis longtemps, il est tout à fait probable que son Gribouille l’ait perçu aussi. Se rendant compte de sa peine, de ses mouvements ralentis, de ses comportements inhabituels, de ses larmes et de son abattement, il a adapté ses attitudes à celles de sa maîtresse.
Une forme de perception des attentats
Il serait excessif et teinté d’anthropomorphisme d’imaginer que les chiens vivent l’horreur présente avec le même regard que nous. Il n’y a pas de raison que les guerres des humains concernent les chiens de la même façon d’autant qu’aucun d’entre eux ne s’abaisserait à de telles attaques sur sa propre espèce.
Il n’est cependant pas du tout imaginaire de se rendre compte qu’ils peuvent être contaminés par nos manières de nous comporter et de ressentir notre environnement à certains instants.
Cela s’appelle la contagion émotive.
Comme son nom l’indique, le concept décrit comment les émotions des uns impactent les émotions des autres, et dans les relations affectives et les liens d’attachements si particuliers que nous créons avec nos animaux de compagnie, la propagation de nos affects se met parfois en place sans même que nous nous en rendions compte.
Si vous voyez qu’il est perturbé
Chacun a son avis sur la façon de réagir face aux agressions que nous subissons, et il est même conseillé par les experts dans les médias de continuer à vivre. Sortir, rencontrer du monde, se rendre à des manifestations, ne pas avoir peur de l’Autre, ne pas changer ses usages.
Pour votre chien, cette recommandation pourra être appliquée selon sa réalité canine : éviter de bouleverser toutes ses habitudes car cela ne ferait que le perturber davantage.
Comme il serait vain de lui expliquer avec des mots ce qui nous arrive, le mieux pour lui est encore de garder intacts ses rituels. Les promenades, les jeux, la nourriture, les caresses, les rencontres avec les autres chiens, bref tout ce qui fait partie de sa routine quotidienne pourra être maintenu. Cette constante l’aidera à passer le cap qui nous atteint et qu’il percevra toujours tant que nous le vivrons, tout en limitant les répercussions négatives pour lui.
Comme pour nous, le temps fera ensuite son œuvre.
Laurence Bruder Sergent