Les affects des animaux
L’actualité en France et ailleurs nous rappelle que les animaux ne sont toujours pas suffisamment protégés de la cruauté et de l’incompréhension humaines.
Un réseau social populaire qui permet l’existence d’un groupe prônant les combats de chiens en France, pourtant interdits, le promeut par son silence et son inaction.
La communauté internationale qui s’émeut vaguement – voire pas du tout – lorsque des animaux sont sauvagement abattus dans les rues de pays voisins pour permettre le déroulement de manifestations sportives.
Des personnes d’apparence sensées qui martyrisent des bêtes sous couvert de tradition ancestrale, comme les taureaux des corridas, pour s’amuser, ou offrir un spectacle sanglant au public avide d’émotions fortes.
Tous ces exemples pris dans l’actualité, et bien d’autres visibles par tous en vidéo sur Internet, nous rappellent à quel point l’ignorance humaine de la condition animale, de ses souffrances et de sa psychologie est grande.
La réalité animale
Depuis Descartes et sa vision de « l’animal machine » sans ressenti, les esprits devraient avoir eu le temps d’évoluer. Autrefois Michel de Montaigne et ses « Essais », Aragon ou Léonard de Vinci, et, de nos jours, Boris Cyrulnik dans « la plus belle histoire des animaux », Elizabeth de Fontenay la philosophe, Albert Jacquard le généticien, Victoria Vanneau l’historienne, Karine Lou Matignon la journaliste, et de très nombreux autres auteurs et penseurs font entendre leurs voix : l’éveil des consciences sur la réalité animale est accessible à toute personne qui en fait la recherche. Mais pas encore dans notre code civil ni dans certains cerveaux obtus.
Langages et représentations
Il est pourtant évident aujourd’hui pour le monde scientifique, les associations de protection animale et tous les heureux propriétaires d’animaux, qu’une forme de pensée existe chez eux, tout comme des émotions et des affects, de réelles capacités de communication et des douleurs psychiques autant que physiques.
Ceux qui en doutent peuvent échanger un regard avec leur chat, appeler joyeusement leur chien – qui y répondra avec ses outils personnels –, randonner avec leur cheval adoré, ou baragouiner quelques onomatopées avec leur perroquet domestique. Chaque individu est comme une nouvelle planète à découvrir, chaque espèce a une forme de langage qui lui est propre et des représentations qui correspondent à son monde. Bien que différentes des nôtres, leurs capacités sensorielles, leurs perceptions et leurs compréhensions des évènements alentour n’en sont pas moins respectables. Les actes de brutalités et d’incitations à la violence à leur égard devraient être sanctionnés à l’avenant.
Stérile et manichéen
Il n’est pas toujours bien vu de défendre les animaux dans notre société car la pression sociale a vite fait d’accuser les défenseurs des animaux de ne pas accorder la même valeur aux humains. Ce manichéisme qu’on nous impose n’est pas nouveau, comme s’il n’était pas possible d’avoir de la bienveillance et du respect pour toutes les espèces vivantes, quelles qu’elles soient. Lamartine y répondait de la manière suivante : « nous ne pouvons pas avoir deux cœurs, un pour les animaux, un autre pour l’homme. Dans la cruauté envers l’un ou l’autre il n’y a aucune différence, sauf pour la victime. »
Le chaton torturé cette semaine appréciera.
Laurence Bruder Sergent
Manifeste pour une évolution juridique du statut de l’animal dans le code civil : http://www.30millionsdamis.fr/fileadmin/user_upload/actu/10-2013/Manifeste.pdf