Pour nombre d’entre nous, retrouver son chien après une journée de travail est un vrai plaisir. Mais nous nous inquiétons aussi de savoir combien de temps on peut décemment le laisser seul.
Notre chien est un mammifère social. Cela signifie qu’il a besoin de contacts avec des congénères, mais aussi avec des sujets d’espèces différentes : humains, chats (s’il a été familiarisé avec eux préalablement), etc. Il lui faut aussi du confort, des promenades, des distractions… cela tombe sous le sens. Pourtant des millions de chiens domestiques (et même de chiots !) sont livrés à eux-mêmes durant 5, 6, 7, 8 heures, voire plus sur une seule journée !
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Désert affectif et absence de distractions
N’oublions pas que nos chiens ont le même rythme de vie que nous, jusqu’à un certain point.
Certes ils dorment la nuit comme nous, et au réveil ils passent un peu de temps à nos côtés avant que nous partions au travail.
Mais ensuite, alors que nous allons à la rencontre des personnes et des situations diverses tout au long de notre journée, ils sont quant à eux, seuls de longues heures, sans contact avec qui que ce soit, dans un environnement immuablement inchangé !
Puis ils ont à nouveau quelques moments heureux en soirée, si on prend le temps de les promener et de les distraire un peu.
Imaginons alors le désert de stimulations qu’ils vivent tout le reste du temps, la pauvreté des heures qui s’écoulent sans occupation.
Il y a de quoi devenir fou ! Ou plutôt, malheureux et en situation de souffrance émotionnelle intense.
Cette solitude imposée ne correspond aucunement à la nature de notre meilleur ami. Il ne faut pas s’étonner de voir les destructions de l’habitation se produire, les malpropretés et autres nuisances sonores qu’ils sont bien obligés de produire pour rompre avec l’ennui ou le malaise de la solitude.
Toutes ces activités de substitution (et bien d’autres, elles ne sont pas toutes citées) sont des moyens pour les chiens de gérer leurs mal-êtres. les éthologues appellent cela des coping styles.
Peut-on limiter les dégâts ?
Vous me direz certainement, et vous aurez raison, qu’il faut bien travailler, qu’on ne peut pas rester à la maison juste pour le chien ! Certes, c’est indéniable (et il y a des chiens qui se sont accommodés de la situation, parfois au péril de leur état émotionnel – générant une impuissance apprise-), mais ce qu’il vit, lui, est parfois à la limite de la maltraitance : c’est particulièrement le cas pour les animaux dont la nature énergique ne peut s’exercer par des heures de course, d’exploration ou de flairage, et pour les chiots qui ont besoin qu’on les aide à grandir.
Il existe des astuces pour limiter ce grand inconfort de l’animal : il serait bon de commencer par éviter de trop le materner lorsque l’on est présent, car on le rendrait involontairement tellement dépendant de nous qu’il pourrait ressentir une grande détresse dès qu’il serait laissé seul. Attention il ne s’agit pas d’ignorer le chien, surtout pas ! Simplement modérer les interactions affectives afin qu’il ne passe pas de “tout” (lorsque l’on est présent) à “rien” (quand nous partons).
Ensuite, on pourra demander à des personnes (voisins, famille ou professionnels) de le sortir pendant les longues absences, mais aussi lui proposer des jouets d’occupations, (les comportementalistes parlent d’ “enrichir son milieu”), le dépenser physiquement afin qu’il récupère de la fatigue durant nos absences, passe le temps, mastique si c’est son besoin, etc.
Il faut bien reconnaître que ce n’est pas le chien qui a fait le choix de vivre dans les conditions de vie que nous lui imposons, il est obligé de composer avec.
Au-delà de la nécessité de palier à ses besoins physiologiques, il n’y a pas de règle absolue pour définir le temps pendant lequel le chien peut rester seul sans dommage, alors on peut retourner le problème : en calculant le nombre d’heures durant lequel nous nous occupons de lui ! Puis faisons l’effort de compenser les privations que nous générons chez lui, il le mérite grandement.
Dans un prochain article, nous évoquerons l’état d’impuissance apprise, dont certains mauvais professionnels abusent pour “cadrer” certains chiens mais aussi, qui touche les animaux dont on ne comble pas pleinement les besoins. A suivre…
Laurence Bruder Sergent
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